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Ma chère Megara.”
Sa plume glisse sur le parchemin. Elle a cette écriture raffinée, qui lui a valu tant d’éloges lorsqu’elle se trouvait sur les bancs de Poudlard. Elle a les yeux rivés sur ces lettres qui se forment parmi les arabesques pour former des mots. C’est quelque chose qui l’a toujours passionné. Si on l’avait laissé faire, elle serait aujourd’hui une sorcière réputée pour les livres et romans qu’elle aurait pu écrire. Malheureusement, quand on vient d’une famille comme la sienne, rien ne se passe jamais comme prévu.
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Cela fait bien des années que nous ne sommes pas parlées. J’ai tant de chose à te raconter, mais toute l’histoire ne tiendrait pas sur un seul rouleau de parchemin.”
Olenna lève la tête et fixe l’immense bureau. Elle a toujours trouvé cette pièce froide. Et quelque part, l’empreinte de son défunt mari demeure encore présente. Tant de chose à raconter à Meg, oui. Énormément. Mais par où commencer ?
***
Être la troisième enfant de la famille Ferell ne lui avait jamais posé de problème. L’attention de ses parent étant centré sur l’éducation de son petit frère, Olenna se retrouvait à pouvoir faire tout ce qu’elle voulait tant qu’elle ne trahissait pas les valeurs de sa famille. A savoir, la pureté du sang avant tout. Cela voulait dire fréquenter les enfants des autres familles de sang-pur afin de créer des amitiés qui finiraient par aller dans les intérêts de sa famille plus tard. Olenna, éduquée dans ce milieu, en venait à trouver cette haine du moldu normale. Après tout, s’ils n’avaient pas de pouvoirs magiques, c’était bien pour une raison, non ? Olenna était cette gamine hautaine, qui regardait les elfes de maison avec mépris et retenait son dégoût en présence des sang-mêlés.
Elle se souvenait du jour de la défaite du Seigneur des Ténèbres. Son père, cet homme dur et froid, et qui pourtant, savait imposer par sa prestance était rentré dans le grand manoir familial blanc comme un linge. Il avait servi son Seigneur avec fidélité et n’avait jamais songé qu’un jour ce dernier puisse être défait. Par un nouveau-né, de surcroît. Quel déshonneur.
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Ma chère Megara,
Cela fait bien des années que nous ne sommes pas parlées. J’ai tant de chose à te raconter, mais toute l’histoire ne tiendrait pas sur un seul rouleau de parchemin. Je ne t’ai jamais oubliée. Jamais. Je ne sais pas si cette lettre te parviendra. J’ignore même si tu es encore en vie.”
Olenna soupire, laisse ses pensées vagabonder et se demande si ça vaut bien la peine. Elle a fini par allumer un feu dans l’âtre de la cheminée pour réchauffer un peu la pièce. Elle caresse du bout du doigt le bracelet en argent qui orne son poignet droit avant de reporter son regard sur le parchemin. Peut-être n’est-elle pas prête pour ça, finalement. Elle repousse la chaise, se redresse et avance jusqu’au guéridon vernis qui trône dans un coin du bureau. Elle se sert un verre d’alcool, riant intérieurement du contenu de la bouteille. Peut-être que les sorciers ont de bons alcools, mais les moldus savent également y faire. Elle en avale une gorgée en admirant les flammes. Les lueurs du feu se reflètent sur son visage et sa longue robe noire. Cette lettre peut attendre. Il y a tellement à dire qu’elle devra sans doute y passer la nuit. Mais pour l’heure, elle doit se préparer. Ce soir, elle doit recevoir son frère, ce cher Ethan. L’unique membre de sa famille qu’elle n’a pas envie de voir s'étouffer dans son propre sang.
***
- Excusez-moi, cette place est libre ?
Mathilda interrompit sa conversation avec Olenna pour toiser la nouvelle arrivante. La jeune Ferell posa un regard froid sur cette gamine et observa sa tenue. On était le premier septembre, jour de rentrée. Les deux fillettes faisaient leur premier pas à Poudlard, mais il fallait d’abord voyager à bord du Poudlard Express.
- Tes deux parents sont des sorciers ? demanda Mathilda avec un air hautain.
La gamine fixa les deux occupantes du wagon avec des yeux ronds et Olenna renifla avec mépris. A sa réaction, non.
- Je suis la seule sorcière murmura la fille. Mais je m’appelle Megara.
- Je m’en fiche bien de comment tu t’appelles tonna Olenna. Fiche le camp, sale sang de bourbe.
Elle bondit de son siège et avança jusqu’à la fillette pour la pousser dans le couloir.
- On ne veut pas de toi, compris ?
Olenna referma sèchement la porte dans un éclat de rire avant de regagner sa place et de ricaner en compagnie de Mathilda. La dénommée Megara resta un instant abasourdie de l’autre côté de la porte avant de partir d’un air misérable. Mathilda lança un quolibet avant de rire à gorge déployée. Olenna détestait l’entendre. Elle avait un rire de truie. Elle n’aimait pas Mathilda plus que ça, mais elle était une sang-pur comme elle. Et elle la connaissait depuis l’enfance.
- Je n’arrive pas à croire qu’on les autorise à étudier la magie commenta Mathilda.
Olenna garda le silence et tourna la tête en direction du paysage qui défilait, une main sous le menton. Et voilà, elle l’ennuyait déjà. Aucune personnalité, cette fille. Elle se contentait de suivre les événements sans y participer.
***
Elle se souvient de sa rentrée. Du sentiment d’excitation qui l’avait saisi quand elle avait posé le pied sur cette barque et qu’elle voyait les lumières du château se rapprocher. Le prestigieux collège de sorcellerie, là où tous les grands sorciers du Royaume-Unis avaient fait leur étude. Norbert Dragonneau était son favori. Même si en son for intérieur, il fallait être à Serpentard pour faire comme ses parents et ses soeurs avant elle, elle avait espéré se retrouver à Poufsouffle, comme lui. Mais non. Le choixpeau avait fait son choix. La maison de Salazar était sa nouvelle demeure. Et elle avait apprécié chaque seconde de ça. Chaque seconde de ses années à Poudlard.
Elle rassemble ses cheveux en une tresse fine. Le but est de ne pas avoir l’air de la veuve éplorée car Ethan sait très bien qu’elle n’avait jamais aimé son mari. Mais également de ne pas avoir l’air trop heureuse du sort de ce dernier. Même si l’image de son corps agonisant est probablement l’image la plus plaisante qui lui reste en tête. ça et les souvenirs de Megara, qu’elle chérit plus que tout. Elle devra quand même bien écrire cette lettre un jour ou l’autre.
***
Elle était en septième année et au lieu de se concentrer sur ses examens comme ses camarades de classe, Olenna se dirigeait à l’orée de la Forêt Interdite. Il faisait nuit et le défi était de passer devant la cabane de cet idiot de garde-chasse sans faire de bruit. Il avait tellement d’animaux celui-ci que le moindre bruit allait déclencher un vacarme qu’on entendrait jusqu’à la salle commune des Serpentard. Elle allait avoir d’énormes ennuis si on la trouvait ici et les conséquences seraient désastreuses si sa famille l’apprenait. La Forêt Interdite ne s’appellait pas la Forêt Interdite pour rien. Mais c’était Olenna tout craché. Braver l’interdit était son moteur dans la vie. Alors qu’elle attendait, la pression montait d’un cran de secondes en secondes. Un bruit de pas se fit entendre et elle serra la main sur sa baguette, le moindre de ses muscles crispés. La silhouette de Megara se dessina et elle poussa un soupir de soulagement.
- T’es en retard lui reprocha Olenna.
Un fin rire s’échappa de la gorge de Megara qui baissa sa cape, dévoilant sa magnifique chevelure blonde.
- Désolée. Tu crois que c’est facile de partir de la salle commune avec la Grosse Dame qui te demande des comptes ?
- T’avais qu’à lui dire que c’est pas ses oignons. C’est qu’un tableau.
Elle franchit sans crier gare la distance qui la séparait de Megara et attrapa son visage entre ses mains pour déposer un baiser sur ses lèvres. Il n’y avait qu’en sa présence qu’elle se sentait enfin elle-même. Que son coeur s’emballait comme ça et qu’elle se demandait à chaque seconde si elle n’allait pas en mourir.
- Tu m’as manqué, Meg souffla Olenna en se détachant enfin d’elle.
Elle posa son front contre le sien. L’année se terminerait bientôt et il allait devenir encore plus difficile de se voir et de vivre de cet amour qui la consummait. Elle était une sang-pur et Meg était une née-moldue. Elle était à Serpentard et Meg était à Gryffondor. Mais pour l’heure, elle ne voulait pas y penser. Elle voulait profiter de chaque instant que la vie lui offrait avec Meg, qu’elle voyait en cachette depuis maintenant deux ans.
- J’ai un cadeau pour toi murmura Meg en s’écartant de quelques centimètres.
Elle fouilla dans sa poche pour en sortir quelque chose d’emballé dans du papier coloré. La curiosité d’Olenna était titillée et elle manifesta sa surprise quand Meg lui déposa le présent dans les mains.
- Joyeux Anniversaire.
Elle baissa la tête, défit doucement l’emballage et découvrir avec stupeur un bracelet argenté, ornée d’un diamant.
- J’aurais préféré que ce soit une émeraude mais le diamant est la pierre de ceux qui sont nés en avril. A un mois près lâcha Meg dans un rire qui sonnait comme une délicieuse mélodie aux oreilles d’Olenna. Chez moi, c’est important. Chaque pierre a une signification.
- Je ne le savais pas.
Olenna manipula le bracelet entre ses mains avant de le mettre à son poignet droit. Sans le quitter des yeux, elle demanda avec une curiosité non-feinte :
- Et ça veut dire quoi, le diamant ?
- La perfection.
Lâchant un hoquet de surprise, elle leva les yeux vers la blonde qui la fixait avec un petit sourire en coin. Elle se mit à rire également et déposa un nouveau baiser sur ces lèvres pulpeuses qu’elle chérissait tant.
- Il est magnifique, Meg. Merci.
Meg attrapa sa main et avança, tirant Olenna derrière elle. Elle tourna la tête dans sa direction pour lui adresser un clin d’oeil qui ne laissait aucune place au doute.
- Allez viens, on va fêter ton anniversaire comme il se doit.
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